mercredi 31 mai 2023

1943 en Haute-Marne (juin)


Des réfractaires au camp de Lamarche. Parmi eux, Roger Olivier, de Chaumont.

(Collection R. Olivier/club Mémoires 52)


 1er juin 1943 : les réfractaires haut-marnais continuent à rejoindre le camp de Lamarche. Cette nuit-là, c'est le cas de Maurice Noirot, Paul Haquin, René Sylvestre, Robert Roquis. Le 9 juin, Gabriel Piot, chef du secteur 416, dirige trois nouvelles recrues, dont André Legendre et Albert Vairelles, puis deux Lorrains le 15 juin, tandis que dans la deuxième quinzaine du mois, une quinzaine de réfractaires envoyés par Emile Darbot (secteur 430) sont contraints de créer un camp satellite au Trou du Chat, près de Laneuvelle.

7 juin 1943 : les Chaumontais François Andriot et Charles Husson arrivent enfin à Londres, après un long périple par l'Espagne.

10 juin 1943 : le fonctionnaire Marcel Segaut est relevé de ses fonctions de sous-préfet de Sarlat, poste qu'il n'a d'ailleurs jamais occupé. Il avait quitté clandestinement la sous-préfecture de Langres en 1942 pour rejoindre la délégation générale de la France libre (Jean Moulin).

12 juin 1943 : arrestation du Nogentais Jean-Marie Bressand à Besançon.

15 juin 1943 : décès à Sachsenhausen de Marius Bocquenet, de Wassy.

16 juin 1943 : Claude-Robert Baverel, d'Ageville, est arrêté en voulant franchir les Pyrénées. 

17 juin 1943 : Mario Berva, de Latrecey, est arrêté à Dijon. Il sera déporté.

22 juin 1943 : 70 petits Parisiens arrivent en gare de Chaumont. Ils rejoignent la colonie de Roôcourt-la-Côte. Parmi eux, trois juives, les soeurs Acounis, qui échapperont aux persécutions.

23 juin 1943 : déportation de Nicolas Schlesinger, de Saint-Dizier.

25 juin 1943 : Raymond Verjux, né à Hûmes, domicilié à Sexfontaines, et Michel Fliecx, de Chaumont, sont déportés.

29 juin 1943 : décès à Sachsenhausen d'Henri Maupin, de Nogent.

30 juin 1943 : arrestation à Chaumont de Louis Régnier, Marie-Louise Régnier et Fernand Millot, à Langres d'Adrien Giudicelli et Albert Grepinet. Tous seront rapidement libérés.

lundi 22 mai 2023

La Compagnie du Val (2) : un dépôt d'armes en forêt


    Les maquisards s'étaient donné rendez-vous en forêt du Val. Ici, lors d'une messe après guerre 
en hommage aux morts du maquis.

Mi-août 1944. Première grande opération clandestine pour les FFI de la Compagnie du Val. Un parachutage avait eu lieu précédemment sur le terrain Gargouille du hameau de Billory, commune de Robert-Magny, près de Montier-en-Der. Celui de la nuit du 10 au 11 juillet 1944, réceptionné par deux agents du Special Operations Executive (circuit Pedlar) et, notamment, par Raoul Laurent, chef départemental de Libé-Nord, et son adjoint Eugène Roux ? Ou celui qui, de source britannique, se serait produit le 9 août 1944 ? Toujours est-il que les résistants bragards partent chercher les armes parachutées pour les entreposer.

Le lieu qui sera choisi pour servir de dépôt d'armes : le Château-Gane, en forêt du Val. Le Val est une vaste forêt privée s'étendant entre la Marne et la Blaise. Y a été érigée, en son coeur, la Belle-Maison, une maison forestière qui, selon l'historien haut-marnais Emile Jolibois, est un ancien rendez-vous de chasse des princes de la maison de Guise. De la Belle-Maison partent huit tranchées forestières menant à Roches-sur-Marne, Saint-Dizier, Marnaval, Valcourt, Humbécout, Wassy, Villiers-aux-Bois et Prez-sur-Marne. C'est sur la tranchée de Prez-sur-Marne, un peu après la Belle-Maison, est situé le lieu-dit Château-Gane, que Michel Zeller, le jeune fils (il a 22 ans) d'un officier installé à Saint-Dizier, a indiqué aux responsables de la Résistance bragarde, 

Le lieutenant Eugène Roux et Raoul Laurent s'accordent à préciser que c'est le 16 août 1944 que les transport d'armes est réalisé depuis Montier-en-Der. Le lieutenant Roux est accompagné de l'entrepreneur bragard Guy Grapinet, qui a mis deux camions de sa société à disposition des FFI. Le chauffeur Lucien Masselot, Louis Pernel, un nommé Buet (ou Buret), Emile Marcillet, Lucien Van Echelpoel et Jean Thiéblemont appartiennent à cette équipe. D'autres volontaires - Pierre Dubus, Alexandre Gairaut, André Serrurier, Yves Vidberg - vont veiller à la garde des armes et explosifs, dont les plus endommagés seront repérés par Zeller, Gairaut, Dubus et Thiéblemont. Ils sont ensuite entreposés dans la baraque appartenant à un boucher de Saint-Dizier (Leclerc), toujours sur la tranche menant à Prez-sur-Marne. C'est à cette "baraque Leclerc" que s'installera le maquis, après l'arrivée au camp de Raoul Laurent et d'un de ses collaborateurs, René Quellais.

Les hommes cités plus haut, et qui sont donc présents depuis la mi-août 1944 dans la forêt du Val, forment le noyau de la 1ère section (lieutenant Eugène Roux) du maquis, dont le parc comprend également un camion du Secours national d'Eurville et un autre mis à disposition par M. Benoit, directeur du dépôt d'essence de la Standard.
La 2e section est constituée effectivement le 24 août 1944, c'est-à-dire le lendemain de la mobilisation générale des FFI de la Haute-Marne. "Le chef de section reçoit l'ordre de faire monter sa section dans la forêt du Val à la Belle-Maison, indique le compte-rendu du lieutenant Lelong. A 21 h, l'effectif est au complet. Transport des armes au nouveau camp. Installation du camp. Préparation des charges d'explosif pour le sabotage de la ligne de chemin de fer de Baudonvilliers..."

Deux opérations sont exécutées dans la nuit du 27 au 28 août 1944. La première : la réception d'un parachutage. Le capitaine Thérin rapporte : "Le capitaine était averti qu'un parachutage d'armes lui serait fait dans la plaine (...), au nord [de la] route Pont-Varin - Voillecomte". Il s'agit du terrain BOA Toboggan, qui a déjà été destinataire d'une opération aérienne début juin 1944. "Avec plusieurs camions à charbon de bois appartenant à M. Grapinet, nous sommes allés à l'endroit du parachutage et avons normalement reçu des conteneurs d'armes", précise l'officier. Dans l'ouvrage Combattants de la liberté, Jean-Marie Chirol apporte d'autres précisions sur cette opération : "L'expédition commence. Point de départ : la baraque Leclerc, dans la forêt du Val, non loin de Villiers-aux-Bois. Itinéraire : tranche de Villiers, tranche ferrée et, par le château du Val, atteindre route de Wassy, puis Louvemont, Pont-Varin, la côte de Voillecomte et terrain Toboggan. Là, ils retrouveront l'équipe de Wassy : Dedet, Garcia, Pirson, Thiéblemont père et fils (...) La petite armada d'ébranle. La 11 CV, conduite par Pierre Dubus, ouvre la marche. Il a à côté de lui Michel Zeller, mitraillette braquée, et, derrière, col au poing, Victor Thérin, Raoul Laurent, également armé d'un colt, et René Quellais, dont le fusil anglais passe par la portière. Viennent ensuite deux camions appartenant à Guy Grapinet, qui conduit le premier. Un fusil-mitrailleur est installé sur la cabine de chaque camion.
    La 1ère section, commandée par Eugène Roux, tireur de FM Schultz, monte dans le premier camion, et la 2e section, commandée par Mougel [en réalité Paul Lelong], dans l'autre. Des ennuis de durite affectent l'un des camions près du château du Val. Le bruit occasionné par les gazogènes donne à cette équipée nocturne et clandestine une allure un peu trop bruyante. Heureusement, le terrain est atteint et chacun se met à l'ouvrage : le lieutenant Eugène Roux est chargé de la protection, Raoul Laurent de la partie technique (balisage, signaux en morse, etc.) et Victor Thérin est le responsable militaire. Tout se passe normalement malgré la pluie qui menace. Trois avions se présentent successivement, et malgré le tir des Allemands qui ont été mis en alerte, deux avions parviennent à l'arguer un important matériel (...) Vite, le balisage est donné, la lettre conventionnelle aussi, et de nombreux parachutes descendent au-dessus de la plaine. Les équipes se mettent au travail avec ardeur pour récupérer les "tubes", et les charger sur les camions. Lorsque le troisième appareil se présente, il est repéré par les Me 110 du Robinson, la DCA et les projecteurs. Aucun signal ne lui est envoyé par Raoul Laurent en raison du danger encouru pour l'appareil et la cargaison des maquisards provenant des deux premiers avions. Ce troisième appareil n'insiste pas et disparaît. Il reste bien des parachutes accrochés aux arbres, mais les gars de Wassy s'en chargeront".
    De son côté, le compte-rendu de la section Lelong note : "Participation de la section au parachutage d'armes de Voillecomte (nuit du 27 au 28 août). Message "Le brigand se cache dans la camisole". Un des hommes de la 1ère section (1er groupe) est blessé par un tube. Convoyage des armes de Voillecomte au camp du Val." Le FFI blessé (à la main) se nomme Martial Thiery, de Saint-Dizier. (A suivre).

jeudi 11 mai 2023

1943 en Haute-Marne (mai)


 François Andriot (en bas), un Chaumontais évadé de France par l'Espagne.
(Collection club Mémoires 52).


1er mai. Un ouvrier, Pierre Salzard, d'Harméville, est tué dans l'explosion d'un obus de 1940 lors d'un chantier à Soulaincout.

. Des prisonniers de guerre indochinois sont détachés dans un chantier en forêt du Der. Ils sont logés à Louvemont.

3 mai. Le Chaumontais Christian Pineau, fondateur du mouvement Libé-Nord, est arrêté à Lyon et emprisonné au fort de Montluc.

. Arrestation de Marcel Monjardet à Chalvraines (il sera incarcéré à Clairvaux).

7 mai. Arrestation à Joinville de Georges Curtinot.

8 mai. Départ d'un convoi de déportation de Compiègne à Sachsenhausen : Emile Leveau (Langres, décédé dans les camps), Charles Benay (Saint-Dizier), Roger Adam (Joinville, décédé), Paul Collin (Marbéville, disparu), Georges Collard (Sainte-Livière), Marcel Varnier (Saint-Dizier) en font partie.

. Arrestation de Fernand Thomas (Langres) à Montigny-le-Roi, de l'officier FTP Henri Hutinet (Bussières-lès-Belmont) dans la Loire.

. Evasion des frères Abel et Georges Antoine (Blécourt et Blessonville) de la prison d'Hinzert.

12 mai. Arrestation de Roger Clément à Echenay.

13 mai. Décès à Manheim de Fernand Chevalme (Saint-Dizier), arrêté en juillet 1941.

14 mai. Arrestation à Chaumont du résistant Albert Gaudry.

17 mai. Déportation vers une prison d'Allemagne de Pierre Hutinet (Rachecourt-sur-Marne) et Alexis Boulommier (Langres).

19 mai. Arrestation d'Albert Reczko à Chaumont.

20 mai. Arrestation de Gustave Breidenstein (Saint-Dizier) pour détention d'arme, de Jean Nowack (Perrusse). Décès de Louis Chauvot (Dommarien) à Buchenwald.

23 mai. Décès de Louis-Emile Thouvenin (Bettaincourt-sur-Rognon) à Wittlich.

24 mai. Le Chaumontais François Andriot est libéré du camp de Miranda (Espagne).

26 mai. Arrestation à Chaumont de Raymond Chalavon (d'Unieux dans la Loire), d'Henri Laborde et Henri Noël. Un pistolet automatique est découvert au domicile de Laborde. Le couple Eugène et Lina Cousin qui hébergeait Chalavon et Noêl seront également interpellés dans le cadre de cette affaire conduite par la Sipo-SD.

. Arrestation du douanier Paul Goguey à Auberive.

27 mai. Une délégation de Wassy se rend à Vichy pour contester auprès du maréchal Pétain le transfert "provisoire" de la sous-préfecture à Saint-Dizier.

28 mai. Maurice Stivalet et Auguste Marlin sont arrêtés à Langres, accusés d'avoir troublé une réunion de la LVF. Arrestation d'Hubert Thomas (Saucourt-sur-Rognon) en Allemagne.

30 mai. Une réunion du Parti populaire français (PPF) se tient à Chaumont.

Courant mai. Arrestation de Bernard Malarme (Wassy). Création d'un chantier forestier à Auberive. Contacts entre les résistants Gabriel Piot (CDLR) et Emile Darbot, Simone Dauvé et Pierre Clavel (BOA), Jean Le Magny, Gaston Huet et André Germain (RN). Réunion de plusieurs patriotes de Chaumont au domicile d'Albert de Saint-Thibault, directeur de l'hôpital. Homologation du terrain Gluck à Pouilly-en-Bassigny. Déportation de René Floquet (Bourbonne-les-Bains).