lundi 24 avril 2023

La Compagnie du Val (1) : un maquis Libé-Nord


Le capitaine Victor Thérin au milieu des saboteurs de la section Lelong.

(Collection Mme Lassalle/club Mémoires 52).


         "N'ayant été armée que pratiquement la veille de la libération, la principale opération de cette unité, en dehors de quelques sabotages, souvent d'ailleurs très efficaces, a été la prise de Saint-Dizier." C'est ainsi que le journal de marche du lieutenant-colonel Emmanuel de Grouchy, chef départemental des Forces françaises de l'intérieur (FFI) de la Haute-Marne, introduit le relevé d'opérations du Bataillon FFI de Saint-Dizier, dont la 1ère compagnie correspondait à la Compagnie du Val, appelée également maquis du Val. Plusieurs documents, pour la plupart inédits, vont nous aider à en savoir plus sur cette unité composée de volontaires de la région bragarde et rattachée au mouvement Libé-Nord.

Sous les ordres d'un officier d'active

        Bragard d'adoption, Victor Thérin est Breton d'origine. Né le 9 mai 1917 à Yffiniac (Côtes-du-Nord), il se définit lui-même comme "un officier d'active sortant de Saint-Cyr en 1939 et qui s'était fait mettre en congé de l'armée après l'armistice de 1940 pour ne pas servir Vichy et s'était retiré provisoirement chez ses beaux-parents à Saint-Dizier pour y travailler avec son beau-père dans une entreprise de grains". Admis à l'école spéciale militaire en 1937, ce militaire était en effet l'époux d'Andrée Fenault, et tous deux seront, après-guerre, gérants des Etablissements Fenault & Thérin.   

        Son entrée dans la Résistance active, le lieutenant Thérin la raconte ainsi : "Le capitaine Thérin a été contacté fin mai 1944 par M. [Marc] Mourey, instituteur, lequel était délégué de la résistance pour la zone Nord Haute-Marne. M. Mourey avait demandé à M. Thérin de bien vouloir former une compagnie de résistance à Saint-Dizier [...] M. Mourey, pour preuve du bien-fondé de sa demande et de son appartenance à la Résistance, a indiqué à M. Thérin qu'il entendrait un message spécial, radio de Londres, le soir-même. Ce qui fut fait. M. Thérin s'occupa donc immédiatement d'organiser sur le plan militaire une compagnie de quatre sections de 30 hommes et un groupe de commandement."

    Né à Saint-Barthélémy (Haute-Saône) le 18 juillet 1911, domicilié à Saint-Dizier où il est instituteur (il résidait rue Anatole-France, en 1936), Marc Mourey, alias "commandant François Jardin", était membre actif de Libé-Nord, créé à l'échelle nationale par un Haut-Marnais (le Chaumontais Christian Pineau), représenté en Champagne par un autre Chaumontais de naissance (Gabriel Thierry) et, en Haute-Marne, par le cheminot bragard Raoul Laurent. C'est donc à ce mouvement que la compagnie sera rattachée.

        "Deuxième quinzaine de juillet, cette compagnie était complètement formée", précise Victor Thérin, qui résidait avenue de la République, près de la Kreiskommanantur. C'est en réalité sur "le papier" que cette unité existe à cette époque. Désigné pour commander la 2e section, le lieutenant Paul Lelong, né à Montreuil-sur-Blaise (Haute-Marne) en 1898, indique ainsi, pour ce qui concerne ses hommes : "Formés dans la clandestinité, les éléments du premier groupe furent contactés en mai 1944 par le chef de section. La section fut définitivement formée le 1er août 1944. Ordre fut donné par le commandant de compagnie de tenir les trois groupes en alerte. Au début du mois d'août 1944, le chef du groupe n°2 fut chargé de déminer les fourneaux de mines installés par les Allemands au pont des Eturbées, à Saint-Dizier. Il s'acquitte avec succès de cette mission, avec quelques hommes de son groupe, sous les ordres du directeur d'une usine de Saint-Dizier."

(A suivre)