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| La division Leclerc de passage à Froncles. |
Grande unité française commandée par le général Philippe de Hautecloque, dit Leclerc, la 2e division blindée française appartient à la 3e armée américaine. Elle se compose de trois groupements tactiques (D, L et V) composés chacun d’un régiment de chars, d’un bataillon d’infanterie porté, d’un groupe d’artillerie. Le 1er régiment de marche de spahis marocains (RMSM) occupe la mission de régiment de reconnaissance de la division, le Régiment blindé de fusiliers marins (RBFM) est l'unité de tanks destroyers.
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| Le général Leclerc fait halte au carrefour de la RN 67 et de la RD 40, à Vignory. |
9 septembre 1944
Après la libération de Paris, la 2e DB se porte le 9 septembre 1944 sur le département de l’Aube (dans la région de Clairvaux, notamment) et de la Haute-Marne (Villars-en Azois, Silvarouvres) en vue des futures opérations.
10 septembre 1944
Le lendemain, elle reçoit pour mission d’attaquer avec le XV Corps américain en direction de la Moselle, qui est l’objectif pour le 11 septembre 1944 au soir. Face à elle, les Allemands tiennent une ligne passant par Châtillon-sur-Seine – Châteauvillain – Chaumont – Andelot – Prez-sous-Lafauche.
Le peloton du lieutenant Henri Serizier (4e escadron, capitaine Horace Savelli, du 1er RMSM) pousse jusqu'à Bologne où il rend compte de la destruction du pont sur la Marne, tandis que la section du sous-lieutenant Cholley du 13e bataillon du génie, rejointe par la section de surveillance (lieutenant Maurer) du Ier RMT qui est à Villars-en-Azois, se porte sur Châteauvillain.
11 septembre 1944
Le 11 septembre 1944, pendant qu'une compagnie du Ier RMT, un peloton du 12e Cuirs et un obusier partent de Villars-en-Azois opérer contre la garnison de Châtillon-sur-Seine, la 2e DB se met en mouvement vers l'Est.
Le détachement du lieutenant colonel Nicolas Roumiantzoff (escadron hors rang, 1er, 4e et 6e escadrons du 1er RMSM) est en flanc-garde sud, ayant pour axe de marche l'itinéraire Lignol – Colombey-les-Deux-Eglises – Vignory – Andelot – Contrexéville (Vosges).
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| Sur la RN 67, à hauteur de Vignory. |
Le GT L (colonel Paul de Langlade) est en tête. Il est découplé en deux sous-groupements. Le chef d’escadrons Pierre Minjonnet, chef de corps du 12e régiment de chasseurs d’Afrique (RCA), commande le premier sous-groupement, qui progresse au nord. Il est composé des 1er et 4e escadrons de son régiment, de la 6e compagnie du 2e bataillon du Régiment de marche du Tchad (IIe RMT), d’une batterie du 40e régiment d’artillerie nord-africaine (RANA) et de deux pelotons du Régiment blindé de fusiliers marins (RBFM) et du 1er RMSM. Au sud, le sous-groupement du commandant Jacques Massu, chef du IIe RMT (moins la 6e compagnie), dispose du 2/12e RCA. Quant au 3/12e RCA, il reste en réserve.
Partant de Bayel (Aube) à partir de 7 h, le sous-groupement Minjonnet passe par Colombey, Marbéville et Vignory.
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| Des hommes de la 2e DB font halte à Marbéville... |
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| ... et à Vignory. |
Ayant fait mouvement une heure plus tôt, le sous groupement Massu emprunte l’itinéraire Rennepont – Montheries – Lachapelle-en Blaisy – Bologne, évitant ainsi Chaumont et Juzennecourt. Un temps d’arrêt est marqué à Vignory à cause de la destruction des ponts sur la Marne et le canal, notamment à Villiers-sur-Marne. Comme le pont de Vouécourt, réparé par les habitants, ne peut laisser passer que des chars moyens, le franchissement de la Marne se fait par le pont de l’usine de Froncles que l’ennemi semble avoir oublié et qui est intact. Les cours d’eau sont franchis à 11 h 45.
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| Le pont de Vouécourt, réparé à l'aide de peupliers. |
Minjonnet continue sa progression sur la rive droite de la Marne par Doulaincourt, Busson, Leurville et se présente devant Prez-sous-Lafauche annoncé comme tenu, tandis que Massu avance par Andelot, Rimaucourt et Saint-Blin.
La prise de Prez-sous-Lafauche
Le sous-groupement Minjonnet, arrivant de la direction de Lafauche, est chargé de nettoyer la résistance de Prez-sous-Lafauche, village sur l'axe Chaumont - Neufchâteau qui est signalé occupé à 13 h 30. Sont engagés le peloton d’éclaireurs (lieutenant Hubert Chevalier) et le peloton de mortiers du 12e RCA, le 4e escadron (lieutenant Jean Baillou) de ce régiment et la 6e compagnie du IIe RMT. Le journal de marche du 4/12e RCA précise : « L’unité s’arrête à l’orée du bois qui domine le village à environ 1 500 m. Des tirs sont exécutés sur une barricade et dans quelques maisons signalées comme étant occupées […], par le sous-lieutenant Servant (peloton d’éclaireurs), le peloton Dufour à l’ouest, le peloton Vautrin et les mortiers doivent traverser le village jusqu’à la sortie Est, le peloton Catala vers la sortie Ouest. Le peloton Chevalier attaque le village venant du nord (près du cimetière). » Le sous-lieutenant Jean Baillou de Masclary, 27 ans, du peloton d’éclaireurs du 12e RCA, « accompagnant le sous-lieutenant Vaultrin, est tué d’une rafale de mitraillette » - à 14 h 30 selon l’historique du régiment.
La résistance tombe rapidement. Les archives du 12e RCA revendiquent entre une centaine et 200 prisonniers, un GMC récupéré, un autre détruit par un tir du char Armagnac II (sous-lieutenant Dufour). Le même document rend compte de la mort de 30 Allemands, tandis que l’enquête de 1948 évoque seize tués, exécutés par les soldats français en représailles de la mort du soldat Armand Button (selon les confidences d’un officier français à l’historien Olivier de Boissoudy). Parmi les blessés allemands, le médecin-capitaine du 12e RCA, Jean Netik, se souvient avoir soigné le lieutenant allemand Bürr. Côté français, il y a deux tués : Masclary et le soldat Button, du RMT, tué d’une balle dans la tête. Il y a également quatre blessés : le sergent-chef Emile Trebald, du RMT, par une balle au bras droit, le brigadier-chef Pierre Rougetet (peloton de mortiers), d’une balle de mitraillette, Marc Gianni, d’une balle à la cuisse droite, Mohamed Tenia, d’une balle au poignet droit, ces trois derniers appartenant au 12e RCA. Puis, après la prise de Prez-sous-Lafauche, à laquelle ont assisté brièvement le général Leclerc - qui, un peu plus tôt, avait fait halte avec sa jeep au carrefour de la RN 67 et de la RD 40, à Vignory - et le colonel de Langlade, le 4e escadron du 12e RCA poursuit sa route en direction des Vosges, précédé de l’escadron du Hays et d’un peloton de TD. Le camp Z1SA des FFI locaux a participé également au nettoyage de la région, revendiquant deux tués ennemis.
A 15 h, le sous groupement Minjonnet repart, atteint Goncourt puis Sommerécourt puis entre dans le département des Vosges. Tandis que Massu s’empare de Contrexéville, le 3/12e RCA, en réserve, garde les ponts de Goncourt et Saint-Thiébault.
De son côté, le détachement Roumiantzoff s'est porté sur Vignes-la-Côte (1er escadron) et Andelot (4e escadron et peloton Chavannes du RBFM). Le peloton Serizier s'est heurté à Andelot à une résistance allemande, perdant un tué (le brigadier Robert Derocle), plusieurs blessés dont un mortellement (Robert Chaplain). L'obusier Edith a été détruit par un coup de panzerfaust.
12 septembre 1944
Le 12 septembre 1944, c’est le GT V (général Pierre Billotte), parti de la veille de l'Yonne et arrivé dans la région de Saint-Blin - Vignes-la-Côte, par Vignory et Doulaincourt, qui a pour mission de réduire le centre de résistance d’Andelot. Tandis que le sous-groupement Putz reste à Bettaincourt-sur-Rognon, ce sont les sous-groupements La Horie, par Rimaucourt, et Cantarel, par Signéville, qui attaquent la localité.
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| L'enseigne de vaisseau Philippe de Gaulle (RBFM) à Bologne. |
La bataille d'Andelot
Le matin, un ultimatum est lancé à la garnison - le kampfgruppe de l'oberstleutnant Ludwig Wienkoop - par l'intermédiaire des capitaines Branet et Dronne, afin qu'elle se rende avant 10 h. Ce que les Allemands refusent. Après une courte mais violente préparation d'artillerie exécutée par le XI/64e régiment d'artillerie de la division blindée (RADB) et une batterie américaine du 273rd Armored Field Artillery Battalion (à 13 h 45), les sous-groupements Cantarel et de La Horie qui débouchent des directions de Vignes-la-Côte et de Saint-Blin passent à l'assaut. Il s'agit essentiellement des 9e (Raymond Dronne) et 10e (Maurice Sarazac) compagnies du IIIe RMT, de la 3e compagnie (Buis) du 501e RCC, d'éléments du 13e bataillon du génie arrivés la veille à Saint-Blin.
Le combat est relativement bref mais violent, la résistance réduite, les otages civils retenus en mairie libérés vers 15 h. Côté français, sept soldats ont été tués (adjudant Roger Deschamps, sergent Henri Pertuiset et Marc Logez, du 501e RCC, sergent-chef Manuel Morillas et caporal Gilbert Biscay, du IIIe RMT, sergent Gabriel Vaugien et Francis Ricardi, du 13e BG), et douze ont été blessés. Le GTV revendiquera plus de 300 morts et 750 prisonniers, dont le lieutenant-colonel Wienkoop, capturé sous le pont du Rognon et conduit au PC du général Billotte à Reynel. Si le bilan revendiqué par les Français est élevé, les fosses communes ne contiendront toutefois que les corps de 66 soldats allemands. Cette différence de bilans humains, certes courante dans une période de guerre, est à l'origine d'une polémique sur un probable massacre de prisonniers allemands. Plusieurs témoignages, et même des documents photos, montrent en effet que des prisonniers ont été froidement abattus, notamment par un officier de la division Leclerc.
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| Les prisonniers allemands réunis dans une prairie d'Andelot. |
Tandis que le GTL libère Andelot, le 4/1er RMSM et le peloton Chavannes du RBFM s'installent à Bourmont, font six prisonniers et détruisent un canon lors de patrouilles sur Levécourt, Maisoncelles et Breuvannes. Pour sa part, le sous-groupement du lieutenant-colonel Jacques de Guillebon, qui comprend la 1ère compagnie (capitaine Boussion) du Ier RMT, un escadron du 12e cuirs et une batterie du 3e régiment d'artillerie coloniale, se porte sur Andelot depuis Villars-en-Azois, via Laferté-sur-Aube, Longchamp-sur-Aujon, Lavilleneuve-au-Roi, Blaisy, Juzennecourt, Bologne.
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| La 2e DB de passage à Laferté-sur-Aube. |
13 septembre 1944
Le 13 septembre 1944, un peloton du 5e escadron du RMSM et une section de la 2e compagnie du 13e BG, c'est-à-dire des éléments du GT Dio également composé du 12e cuirs et du 3e escadron du RBFM, reçoivent à 14 h l'ordre de reconnaître Chaumont. Venus par Villiers-le-Sec, ils parviennent, malgré les obstacles (des abattis, les gravats du viaduc partiellement détruit, un fossé anti-chars) à entrer dans la ville à 16 h. D'autres éléments arrivant de Brethenay pénètrent dans la cité dans la soirée.
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| Un half-track de la 2e DB dans le centre-ville de Chaumont. |
14 septembre 1944
Le 14 septembre 1944, rejoint la veille par les éléments détachés à Châtillon-sur-Seine et Essoyes, le Ier RMT laisse l'escadron Bonhomme à Villars-en-Azois et se dirige (3e compagnie du capitaine Joubert) sur Vrécourt (Vosges) au sein du groupement Rouvillois, avec un escadron du 12e cuirs, le peloton de 105 et une batterie du 3e RAC. Ce groupement passe par Andelot, Saint-Blin, Chalvraines et Bourmont. La compagnie du RMT du sous-groupement de Guillebon est à Brainville-sur-Meuse. Au détachement Roumiantzoff, le peloton Serizier du 4/1er RMSM et un peloton du RBFM détruisent à Damblain (Vosges) un canon de 88 et douze véhicules dont deux blindés.
La jonction entre la 2e DB et la 1ère DB venue de Provence se fait ce jour-là en Haute-Marne à Chamarandes par le 1er RMSM et le 2e RSAR, et à Clefmont le lendemain par les mêmes unités.
15 septembre 1944
Le 15 septembre 1944 (selon le JMO du Ier RMT), le sous-groupement Rouvillois pousse sur Rimaucourt via l'itinéraire précédent, à partir de 9 h 20. « Le passage du canal de la Marne à la Saône à Bologne sur un pont de fortune retarde la marche de la colonne qui parvient à destination à 12 h 30 » (JMO). Au soir, le Ier RMT - dont le commandant Robert Quilichini a pris le commandement le 12 septembre 1944 à Villars-en-Azois en lieu et place du commandant Henry Farret - est à Rimaucourt (où est le PC du GTD), Bourmont, Andelot et Orquevaux. Se déplaçant sur Chaumont, le sous-lieutenant Debos, de l'escadron Bonhomme (FFI parisiens), fait deux prisonniers dans la ferme de Huguenotte.
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| Un obusier, de passage sur un pont de fortune. |
Le 16 septembre 1944, le Ier RMT quitte Rimaucourt pour Bulgnéville via Bourmont, rejoint le lendemain par l'escadron Bonhomme. Les opérations de la 2e DB en Haute-Marne sont terminées.
A l’occasion de son passage dans le département, plusieurs FFI s’enrôlent dans les rangs de la division, issus principalement de la Compagnie du Val.
Source principale : journaux des marches et des opérations du 1er RMSM, du 12e RCA, du RMT, Service historique de la Défense ; Jérémy GERARD, Andelot dans la tourmente, 1940-1944 ; La Haute-Marne et les Haut-Marnais durant la Seconde Guerre mondiale, club Mémoires 52, 2023 ; archives de Daniel Guérain et Olivier de Boissoudy ; photos issues de la collection du club Mémoires 52.
























