Il
y a 125 ans, le 15 janvier 1894, 83 soldats de l'armée française,
dont onze officiers, perdaient la vie lors du désastre de Dongoï
(ou Tacoubao), au Soudan. Deux Haut-Marnais figurent parmi les
victimes de la colonne Bonnier : le commandant Paul Hugueny,
commandant d'un bataillon de tirailleurs soudanais, et le capitaine
Jean-Baptiste Tassard, chef de sa 5e compagnie. Tous s'étaient
portés au secours d'un autre Haut-Marnais, le lieutenant de vaisseau
Pierre Boiteux, dont la mère résidait alors à Meures où elle est
née et où elle s'est mariée.
François-Joseph-Edme-Paul
Hugueny est né à Châteauvillain le 4 octobre 1847. Il est le fils
de François Hugueny et de Marie-Ambroisine Ramelet, qui résideront
ensuite à Dammartin-sur-Meuse, dans le canton de Montigny-le-Roi.
Paul
Hugueny s'engage à l'âge de 18 ans au 2e régiment de zouaves. Il
participe à la guerre de 1870 au cours de laquelle il est promu
sous-lieutenant. Puis il passe lieutenant le 22 mai 1873, servant au
13e bataillon de chasseurs à pied. Capitaine le 2 mai 1881, Hugueny
est affecté dans l'infanterie de marine le 7 juillet 1882, servant
dans les tirailleurs tonkinois, puis au 3e régiment d'infanterie de
marine. En non activité en 1887, puis rappelé au service deux ans
plus tard, il prend part à la campagne de 1891 contre le chef
Samory. Commandant la 7e compagnie, le capitaine Hugueny se distingue
lors du raid de Bissandougou, capitale de Samory, où il entre le 9
avril 1891 (la cité a été incendiée, avec son palais).
Il
est promu chef de bataillon le 11 février 1892 et affecté au 2e
régiment d'infanterie de marine de Brest.
L'Univers
illustré a publié des extraits de lettres du commandant Hugueny,
racontant à sa famille la prise du village de Diéna (24 février
1891), puis confiant ces ultimes impressions de campagne : «Le colonel m'a fait appeler
et m'a dit ceci : «Après la campagne contre Samory, je
suis obligé, pour garder le pays, de laisser une compagnie à Kankan
(120 km au sud de Siguri) et j'ai pensé à vous. Je sais que vous
avez fini vos deux ans et que vous pouvez rentrer en France. Je vous
demande si vous voulez rester. Après mon départ, il y aura
peut-être des révoltes, que vous devrez apaiser à coups de fusil ;
mais je vous connais et je serai tranquille si vous acceptez ce
poste.» Comme bien vous pensez, je n'ai pas dit non.»
Et le journaliste de conclure ainsi son article : «Le brave
commandant Hugueny ne reverra jamais la France !».
Commandant du bataillon de tirailleurs sénégalais, il devait
prendre le commandement de la place de Tombouctou si sa
mort affreuse n'était pas survenue.
L'historique
du 2e régiment de tirailleurs sénégalais raconte les circonstances de la tragédie, au retour de Tombouctou : «Le
15 janvier, à 5 h 30, deux coups de feu suivis du cri de :
«Aux armes» retentissent ; en un clin d'oeil tout
le monde est debout, mais trop tard : 250 fantassins et 150
cavaliers Touaregs se sont glissés jusqu'aux abords du bivouac et
surgissent de toutes parts, renversent les faisceaux, chassent les
bœufs et les tirailleurs affolés devant eux. L'attaque est si
rapide, le désordre est tel que toute résistance est impossible ;
un quart d'heure après, le détachement presque en entier est
exterminé. Le capitaine Nigotte, le sergent-major Béretti, le
sergent Labire et huit tirailleurs, réussissent à se faufiler de
buissons en buissons et aboutissent à un marigot qu'ils franchissent
avec beaucoup de difficulté. Deux heures et demie après, ils
rejoignent le sous-lieutenant Sarda.»
Le nom du commandant Hugueny, comme celui du lieutenant-colonel Bonnier, a été donné à un
fort de Tombouctou, ainsi qu'à une rue de Chaumont. Elle voisine
avec la rue du Capitaine-Tassard, son compagnon d'infortune.
Né
à Andelot le 25 janvier 1857, Marie-Jean-Baptiste-Arthur Tassard,
sorti du rang, avait été promu sous-lieutenant en 1883. Lieutenant
au 3e régiment d'infanterie de marine, porte-drapeau, il était
passé capitaine le 17 mars 1893.
(Source de l'illustration : La Presse)
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