Jules Didier, alias "Mercier". (Collection club Mémoires 52).
L'histoire
du mouvement de résistance "Front national de lutte pour
l'indépendance de la France" (FN) en Haute-Marne a fait l'objet d'un travail inédit
réalisé par Jean-Marie Chirol, président-fondateur du club Mémoires 52. En
voici plusieurs extraits avec d'abord un chapitre consacré à Jules Didier,
responsable du Parti communiste français et du FN dans le
département entre septembre 1943 et janvier 1944.
"Jules Didier, artisan ébéniste d'art, né à Dannemarie (Doubs) le 5 septembre
1903, adhère au Parti communiste dès 1927. Toute sa vie est un
combat au service de son idéal, de la justice, de la solidarité et
de son pays. Sa vie militante n'est pas exempte de tracasseries. La
ligne définie par son parti le fait désigner à la vindicte de ses
chefs lorsqu'il est mobilisé pendant la Drôle de guerre, mais il
sait éviter les pièges qui lui sont tendus.
La
défaite n'affaiblit pas sa détermination. Un an plus tard, le 22
juin 1941, les nazis viennent l'arrêter à Vesoul, à son domicile,
51, boulevard des Alliés. Emprisonné au camp de Compiègne, il y
côtoie de nombreux dirigeants et militants de son parti, reconnaît
parmi eux des amis des départements voisins du sien, notamment Emile
Mauguet, de Saint-Dizier, arrêté le même jour que lui, et qui
décédera le 2 juillet... Le frère de Maurice Thorez qui est
également là parviendra à s'évader mais sera plus tard à nouveau
arrêté et fusillé par les nazis.
Jules
Didier participe activement au creusement d'un tunnel de 60 m de
longueur qui, une fois terminé, permet l'évasion, d'un seul coup,
de 19 détenus. L'évasion de Jules Didier est fixée au lendemain
mais, hélas, la fuite de la veille a été vite découverte... Elle
engendre de dures représailles. Il reste par conséquent dans ce
camp maudit... La chance vient non pas en dormant, mais en agissant.
Elle lui sourit le 13 février 1943. Jules Didier parvient cette fois
à s'évader au terme d'un internement qui aura duré 19 mois et 20
jours... A priori, il pense pouvoir se rendre dans le Pas-de-Calais
pour reprendre le combat clandestin et se met en route. Peu après,
épuisé, il renonce à son projet initial et s'arrête à Belleu,
près de Soissons, où il est recueilli par le cantonnier du village.
Ce dernier l'héberge durant sept semaines, après quoi Jules Didier
rejoint son domicile de Vesoul où la Gestapo est déjà venue à
plusieurs reprises perquisitionner...
Pendant
la captivité de son mari, Renée Marcelle Didier, alias «Hélène»,
n'a pas attendu l'hypothétique retour de l'absent en se lamentant,
bien au contraire. Egalement militante active de longue date, elle a,
au mépris du danger, transformé son pavillon vésulien (à peine
terminé) en relais et planque pour les clandestins de passage. Deux
semaines environ après son retour à Vesoul, Jules Didier, alias
«Mercier», est nommé responsable régional (RR) du Front national
pour le Doubs ainsi que pour le Territoire de Belfort. Il reste dans
cette région environ deux mois, puis est envoyé en
Meurthe-et-Moselle en qualité de RR du Parti communiste clandestin.
Dans ce département, le PC a besoin d'un cadre sûr et efficace en
raison, essentiellement du secteur minier, le fer étant une matière
première indispensable aux besoins de l'ennemi.
Jules
Didier réside alors, avec son épouse, dans un petit appartement
nancéien. Renée Didier, pour ce qui la concerne, est responsable du
secteur «femmes», mission à laquelle elle se voue totalement
au mépris des risques énormes car l'ennemi et ses agents traquent
sans répit les patriotes...
«Lionel»
(ou «Robert»), un cheminot de Besançon, qui jusqu'alors était RR
du PC/FN de Meurthe-et-Moselle part pour la Haute-Marne assumer des
fonctions identiques lors de l'arrivée à Nancy de Jules Didier.
A
la mi-septembre 1943, ils permutent.
C'est
alors que «Mercier» prend en charge le département de la
Haute-Marne à la fois comme RR politique et FN, en attendant de
recruter un militant qui sera susceptible de le décharger de cette
seconde responsabilité. Quand Lucien Pinet (alias «Lejeune»)
arrive en Haute-Marne, c'est à lui que «Mercie » confie le
FN dont il devient ainsi le RR.
Notons
au passage que le colonel Fabien vient à cette époque plusieurs
fois en Haute-Marne, et spécialement au mois de novembre 1943 pour y
rencontrer «Mercier». Le contact se fait dans l'arrière-salle d'un
café de Marnaval." Selon les indications rapportées à Jean-Marie
Chirol en 1983, "Fabien aurait logé au domicile de M. Bosquet père,
contremaître à Marnaval...
…
L'ennemi ne reste pas inactif. Aussi, Jules Didier, en ces derniers
jours de décembre 1943, doit-il se mettre au vert chez son ami Paul
Foubet, à Noidant-le-Rocheux. Le 5 janvier 1944, «Mercier» part
pour le Jura afin d'y assumer des responsabilités similaires mais
dans une région stratégiquement plus importante...
Les
activités du responsable régional sont connues de la Gestapo, en
témoigne l'acte d'accusation des patriotes de Chaumont, traduits
devant la justice militaire allemande le 8 mars 1944. «Un certain
René (Ndlr : René Pajot, chargé de mission du Bureau des
opérations aériennes) et un certain Mercier, dont l'identité n'a
pu jusqu'ici être établie d'une façon plus précise, mais qui,
semble-t-il, ont leur domicile à Paris, avaient entrepris de former
dans le département des groupes de résistance, qui sont en général
désignés sous le nom de FTPF... » Dix jours plus tard, onze
patriotes seront fusillés à Chaumont, dont plusieurs membres du
groupe Corse des FTPF...
"Renée
Didier travaille sans relâche dans le secteur Femmes, jusqu'à la
mi-janvier 1944 et rejoint son mari dans le Jura. Elle poursuit,
là-bas, la même activité.
Après
le départ de l'occupant, le capitaine Mercier réintègre, avec son
épouse, son département et sa ville de Vesoul. Jules Didier siège
alors au Comité départemental de Libération, au grand jour et y
représente le PCF..."
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