lundi 12 novembre 2018

Saint-Dizier, berceau du bowling en France



Un des premiers bowlings de France, aux Folies-Bergères, à Paris. 
(Cliché paru dans La Vie au grand air).

La brasserie Georges, à proximité de la gare de Perrache, est l'un des haut-lieux de la restauration à Lyon. L'établissement, fondé en 1836, a compté, parmi ses habitués et ses clients de passage, Lamartine, Verlaine, Jules Verne, Zola, Rodin, Brel, Hemingway... Pourquoi en parler ici ? Parce que début 1909, la brasserie attendait la livraison de deux allées de 20 mètres d'un tout nouveau jeu apparu en France : un bowling. Et que ces installations ont été fabriquées à Saint-Dizier.

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, ce n'est pas avec le Corps expéditionnaire américain, à la fin de la Première Guerre mondiale, que le bowling est apparu en France, mais avant le conflit, en 1907, par l'intermédiaire d'une société américaine toujours en activité, Brunswick – ainsi que le rappellera la justice française.
Fondée par un immigré suisse, la firme possédait des établissements à New York, Cincinnati, Muskogeon, San Francisco et Toronto, et un seul hors du continent américain : dans la cité bragarde, qui attirait donc déjà, dès les années 1900, des investisseurs étrangers, et notamment américains.

A l'origine, le site haut-marnais de la Compagnie Brunswick française, branche hexagonale de la société américaine, qui avait son siège au 19, rue de la Pépinière à Paris, fabriquait des queues de billard. Il était implanté rue (puis avenue) de Bar-le-Duc (actuelle avenue du Général-Sarrail), à une époque où existaient déjà les usines Hachette, Gravigny... Grâce aux recensements, nous connaissons quelques noms d'employés, comme le concierge, Auguste Durantet, né à Puteaux en 1858, domicilié au 78 bis de la rue en 1906.

Les produits issus de la scierie bragarde – où l'Angevin Augustin Rouault exerçait le métier de «billardier» - étaient renommés. Lors d'une exposition industrielle, à Nancy, en 1909, Brunswick était en effet présentée comme le plus important fabricant de billards en Europe. Le catalogue précisait alors que l'usine produisait, chaque année, 12 millions de procédés de queue de billard et 24 000 queues de billard. En outre, la société «construit le fameux jeu de bowling (quilles de précision) qui fait fureur en France depuis deux ans». Une publicité, en 1908, insistait d'ailleurs sur le caractère pionnier du bowling Brunswick, «le fameux jeu de quille de haute précision, le plus entraînant de tous les sports, seul concessionnaire des brevets et fabricants en Europe».

Primée à l'exposition de Bruxelles en 1910, la compagnie, qui possédait une autre usine à Clichy, a notamment produit un billard sur lequel un célèbre joueur, Louis Curé, professeur à l'Académie de l'Olympia, a battu «le record du monde au cadre de 45 à deux coups», en février 1911, «fantastique prouesse» saluée par la presse.

L'activité de la scierie bragarde «Les Billards Brunswick», toujours attestée en 1911, semble avoir cessé avant la Première Guerre mondiale, puisque rapidement, en novembre 1914, le site se transforme en hôpital pour blessés, l'hôpital complémentaire n°41, d'ailleurs connu sous le nom d'hôpital temporaire... Brunswick. Ses locaux seront ensuite occupés par l'usine La France, selon le chanoine Petit.

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