Des SAS aux côtés de maquisards à Auberive. Ils appartiennent plutôt aux opérations Hardy et Wallace, puisque Robey n'était pas dotée de jeeps. (Collection Jean Maire).
Un
citoyen britannique résidant en Haute-Marne, Roger Haycock, s'est
intéressé aux opérations du Special Air Service dans le sud du
département. Il évoque ici une mission méconnue dans ses grandes
lignes : l'opération Robey, distincte de Hardy et Wallace, et placée
sous les ordres du lieutenant Michele Pinci.
“L'escadron
de jeeps du capitaine Hibbert, composé de neuf jeeps et de 29
hommes, quitta la base 5, au sud de Vivey, le 6 septembre 1944, pour
opérer dans la zone au nord de Bourbonne-les-Bains ; les lieutenants
Pinci, Walker-Brown, Taylor et Kerr, ainsi que 19 autres gradés ont
été laissés, dans la région du Plateau de Langres, sous le
commandement du lieutenant Pinci. Leur mission était de mener des
attaques et des embuscades le long des routes Châtillon - Chaumont,
Chaumont - Langres et Langres - Dijon. Pinci a déplacé ses hommes à
Auberive, principalement pour être proche de l'équipe Jedburgh
Bunny qui avait un émetteur-récepteur radio et qui, à ce
moment-là, restait dans le village. Les Allemands étaient partis et
le drapeau tricolore français flottait sur le clocher de l'église
ainsi que sur la mairie. Le capitaine “Max” (Note : chef du maquis d'Auberive) et le colonel
“Michel” y avaient installé leurs postes de commandement dans
l'abbaye. Des barrages routiers avaient été érigés tout autour du
village et des maquisards faisaient office de sentinelles et
patrouillaient dans le périmètre.
Le
lieutenant Pinci a effectué une longue reconnaissance à Troyes et à
Paris pour trouver un moyen de transport, mais il voulait également
obtenir les services d'un détachement de voitures blindées. Il
rencontra le capitaine Fleetwood-Hesketh, officier de liaison, qui a
sauté en parachute avec le personnel de Hardy, mais qui opérait
principalement en Côte-d'Or. Hesketh a amené Pinci à Paris pour
qu'ils rencontrent, au QG du SHAEF, le général Joinville. Ce
dernier lui avait expliqué qu'un détachement de la 2e division
blindée du général Leclerc était en route pour la région. Les
deux hommes sont donc retournés par Chatillon-sur-Seine, ville qui
avait été libérée le 9 septembre.
Michele Pinci est né le 13 juin 1923, à Pangbourne,
Berkshire, fils unique du comte Mario Pinci et de Gwendoline Kennedy... Pinci a été nommé sous-lieutenant de
l'Artillerie royale le 26 juin 1943. Après son transfert au 2nd
Special Air Service, il a été envoyé en Côte-d'Or, en août 1944.
La terrain de parachutage, connu sous le nom de Hardy 9, était dans
une clairière, près de la base 3, bien caché dans la forêt près
de Gurgy-la-Ville, lors de la nuit du 23 au 24 août 1944. Bien qu'il
soit né et ait fait ses études en Angleterre, il avait également
vécu à Paris où sa famille avait une maison. Il parlait couramment
le français. Cette compétence, il a pu l'utiliser à bon escient
pendant son séjour en France, car il a pu assurer la liaison avec le
maquis. Il pourrait bien avoir assisté à des réunions auxquelles
assistaient le major Farran et le capitaine Hibbert du SAS, et les
colonels «Claude» et «Michel» et le capitaine «Max». Ses
compétences linguistiques ont peut-être été également la raison
pour laquelle il a été laissé à ce poste parce qu'il devait
travailler avec le maquis. Vivant en France et presque bilingue, ses
perspectives pouvaient être inhabituelles et rafraîchissantes. Mais
gardant son caractère, en particulier son sens de l'humour très
réactif, il restait aussi anglais que tout anglais pouvait l'être.
L'une de ses nécrologies parle d'un "fils" fidèle aux
deux pays dans lesquels il vivait.
Pendant que
Pinci était à Paris, le lieutenant Robert Walker-Brown a pris des
responsabilités et a réussi à obtenir trois véhicules qui
appartenaient au maquis. C'étaient trois camions délabrés. Ils ont
tendu une embuscade avec ces véhicules au sud de Châteauvillain,
sur la route entre Chaumont et Chatillon désormais désignée D 65,
au croisement Latrecey-Coupray. Quatre grands véhicules de transport
de troupes bondés de troupes, et précédés d'une moto avec un
officier sur le siège passager, sont tombés dans leur piège. Ils
ont estimé les pertes ennemies à 80, y compris le motocycliste et
l'officier. Le SAS n'a connu aucune perte mais le capitaine Géminel,
un officier français qui faisait partie de l'équipe Jedburgh Bunny,
a reçu une balle dans la jambe. Cela s'est produit lorsque deux des
véhicules utilisés pour les embuscades n'ont pas réussi à
démarrer. Ils étaient maintenant sous le feu et tentaient de faire
démarrer les véhicules en les poussant, lorsque Maurice Géminel a
été blessé à la jambe et au genou. Estimant que Géminel était
mort, le groupe à l'origine de l'embuscade s'est retiré et l'a
laissé sur place. Le père Marotel, prêtre de Latrecey-Coupray,
secouriste de la Croix-Rouge, a trouvé le capitaine Géminel,
blessé, près d'un buisson. Il l'a emmené à Coupray où madame
Fournier lui a donné une boisson revigorante composée de café et
d'eau de vie. Madame Souichon a fourni une couverture et une
bouillotte.
Le capitaine
«Max» n'était pas content d'apprendre que Géminel avait été
abandonné et a envoyé un groupe de maquisards pour le retrouver et
le ramener mort ou vivant. Ils l'ont trouvé à Coupray où le père
Marotel avait administré les premiers soins. Pendant la nuit, il a
été ramené à Auberive. Peu après, le médecin-capitaine Henri Le
Brigand, chirurgien parisien, qui était en charge du groupe mobile
chirurgical 3, l'a opéré avec succès à Auberive. Ce service de
santé parisien était composé du lieutenant Marc Dalloz et des
infirmières Eliane Simonard et Jean Lafontaine. Le maquis a
poursuivi ses opérations dans la région de Latrecey - Coupray
pendant les deux prochains jours (9/10 septembre) non seulement pour
restituer la couverture et la bouillotte prêtées à Géminel, mais
aussi pour suivre les mouvements allemands. Les Allemands évacuaient
Châtillon et lors d'une escarmouche avec la très grande force
allemande, trois maquisards furent tués.» Sur la blessure du
capitaine Géminel, lire la brochure que le club Mémoires 52 a
consacré à cet officier et à la mission Bunny.
«Pendant ce
temps, l'opération Robey avait servi également à effectuer des
reconnaissances sans résultat. On ne nous dit pas où les hommes
sont allés, mais il semble que le maquis avait repris les opérations
dans la zone de Coupray, et les SAS étaient allés ailleurs. Le
lieutenant Marsh, qui participait à l'opération Rupert, était
arrivé et avait rejoint le parti le 10 septembre. Rupert était une
opération du 2nd SAS effectuée dans la région de Saint-Dizier au
nord de la région de Hardy. L'idée du SHAEF avait été d'engager
trois opérations SAS en même temps en Bourgogne et en Champagne.
Elles étaient en place le long de routes susceptibles d'être
empruntées par les forces ennemies se retirant en Allemagne.
Houndsworth était une opération du 1st SAS au sud et
Hardy devait permettre la jonction entre ces deux régions.
L'opération Rupert fut rattrapée et dépassée par la 3e armée
américaine... Certains hommes de l'opération Rupert étaient entrés
en contact avec les Américains le 31 août. Le lieutenant Marsh, qui
se trouvait dans la région au sud-est de Saint-Dizier, effectuant
des opérations de sabotage contre les lignes de chemin de fer, avait
également croisé les Américains. La raison pour laquelle il est
allé rejoindre l'opération Robey, qui a facilité son déplacement,
n'est pas claire, mais sa présence était évidemment souhaitable
dans la région de Langres, car la ville fortement fortifiée était
sur le point d'être libérée.» (Sur l'opération Rupert, lire
également l'article qui lui est consacré sur ce blog).
«Le matin
du 11 septembre, Pinci est revenu à Auberive. Il conduisait une
Lancia qu'il avait récupérée à son domicile familial à Paris.
L'après-midi, alors qu'il patrouillait dans la voiture près de
Recey-sur-Ource, il a été la cible d'un avion allié et mitraillé.
La voiture, qui n'était pas matérialisée avec des sigles alliés
et qui a été confondue avec une allemande, a été détruite, et
Pinci a été tué. Il a été enterré à Auberive, mais plus tard
ses restes ont été exhumés et enterrés au Clichy Northern
Cemetery (cimetière nord de Clichy-la-Garenne), à Paris. Le
lendemain de la mort de Pinci, l'opération Robey a été privée de
ses trois véhicules civils par le maquis d'Auberive. Les SAS
soutiennent que, bien que le colonel Claude, qui commandait les
maquis en Haute-Marne (Note : il était le chef des FFI de la Région
D) ait ordonné de les renvoyer, le capitaine Max (chef d'Auberive) a
refusé d'obéir à cet ordre. Qu'avec le retrait des Allemands, le
capitaine Max était devenu politisé et des tirs ont été signalés
entre celui-ci et d'autres groupes de maquisards plus «orthodoxes».
Cela ne
correspond pas aux compte-rendus français. Tout d'abord, Max
relevait du colonel Michel et non du colonel Claude. Cela a peut-être
entraîné une confusion car le quartier général de Claude n'était
pas loin, à Aignay-le-Duc. Il avait participé à la bataille de
Châtillon deux semaines plus tôt. En effet, le secteur de
commandement de Claude incluait la Haute-Marne. Mais le jour en
question, le maquis d'Auberive était parti pour rejoindre la 1èe
division blindée, à Prauthoy et Longeau, où il y avait un conseil
de guerre avec le général du Vigier, le général Sudre, le
lieutenant-colonel Durosoy commandant le 2e cuirassiers, le
lieutenant-colonel Lecoq, commandant le 2e Spahis, le colonel de
Grouchy («Michel»), représentant les FFI, et le commandant
d'Astier. De leur côté, les commandos français travaillaient sur
un plan d'attaque de la ville de Langres. Il y avait plusieurs
objectifs, mais une compagnie commandée par le capitaine Max devait
marcher sur Saints-Geosmes, suggérant fermement, à ce moment-là,
qu'il exécutait des ordres. Le 13 septembre, le rapport de
l'opération Robey mentionne que le lieutenant Walker-Brown a
organisé une attaque contre le village de Saints-Geosmes, qui était
une garnison allemande. Le capitaine Max et son maquis avait marché
sur le village au petit matin du 13 septembre. Il avait pris contact
avec le 2e Spahis pour organiser l'attaque qui avait pris neuf
heures. Il faut rappeler que Max commandait 580 hommes et que 23
commandos ne pouvaient pas contribuer à ce stade, bien qu'ils aient
participé à l'assaut de Saints-Geosmes et se soient rattachés à
la colonne française dans l'espoir de récupérer du transport de
troupe pour se déplacer vers l'est à travers les lignes ennemies.
Ils avaient fait quatre prisonniers allemands mais le seul moyen de
transport qu'ils avaient trouvé était tiré par des chevaux.
Le 15
septembre, l'opération Robey prenait fin et les hommes reçurent
l'ordre de regagner le Royaume-Uni. Dans le même temps, les
opérations Wallace et Hardy ont également pris fin. Un très grand
nombre de forces allemandes se déplaçaient vers l'est, il était
donc impossible d'effectuer des patrouilles avec les SAS.»
Je ne pense pas que les hommes de la jeep soient britanniques SAS car ils portent des bérets.
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