samedi 30 janvier 2021

29 août 1944 : accrochage tragique à Aulnois-en-Perthois

Illustration : Georges Masselot, de Saint-Dizier, tué au combat d'Aulnois. (Collection J.-M. Chirol).


Vers le 26 août 1944, ordre est donné au maquis Mauguet qui, fort d'environ 80 hommes, est stationné dans le bois de Maizières-lès-Joinville depuis le 12 août, de faire mouvement entre Sommelonne et Chancenay pour surveiller la RN 35 (Saint-Dizier/Bar), sur laquelle circulent d'incessants convois ennemis. Ainsi, séparément, les quatre sections se mettent en branle pour atteindre le point de regroupement convenu. Lors du passage à Cousances, Savonnières et Aulnois, plusieurs Polonais, Russes et Français s'intègrent à la 4e section. C'est le cas de deux Polonais, prisonniers évadés, de Félicien Ménaille, carrier à Savonnières...

Le maquis se compose alors de quatre sections :

. 1ère section, dites des anciens (Edmond Thouvenot et Henri Meunier)

. 2e section (Roger Chassard et André Sorg)

. 3e section (Georges Chapron et Gilbert Lefèbre)

. 4e section (Léonid Lachkov).


Léonid Lachkov est né en 1922 à Siebege (Russie)1. Elève de l'Ecole aérotechnique militaire de Leningrad, il fut mobilisé et capturé sur le front russe. Envoyé en Lorraine au printemps 1943, puis à Saint-Dizier puis la Meuse puis Reims, il s'évade le 11 décembre 1943. Aidé par un Russe domicilié à Cousances-aux-Forges, Alexandre Pétrov, il est incorporé avec quatre compatriotes au maquis Mauguet – le 7 juillet 1944, selon l'article. Bientôt, son détachement s'élève à treize puis 17 Russes, la plupart évadés de Saint-Dizier. Parmi eux : Mikhail Stépanov, Ivan Sémentsov, Nikolai Vassiliev, Sémion Salamatov, Pavel Matveev, Nikolai Sazonov, Ivan Kostenko, Edouard Koritko... Sa section s'augmenta également de Polonais et de Français (dont Robert Buche).


29 août 1944

La 4e section atteint Aulnois-en-Perthois vers 9 h 30. C'est l'arrêt pour la pause dans un verger situé à 300/400 m de la RN 4. Les habitants d'Aulnois viennent ravitailler les maquisards. Pendant cette pause, Robert Pierron, d'Aulnois, est posté en guetteur dans un pylône électrique qui domine la RN 4.

La section, composée de 25 hommes, après renfort, est commandée par un prisonnier russe évadé, Léonid Lachkov (« Léon »). Vers 11 h, la pause terminée, les maquisards se répartissent en trois groupes pourvus chacun d'un FM. Léon prend la tête du premier groupe. L'un après l'autre, avec un intervalle de sécurité, chaque groupe doit progresser vers le talus de la RN 4, franchir celle-ci, courir à découvert quelques centaines de mètres avant d'atteindre l'orée d'un bois.

Lachkov, avec son groupe, suit normalement l'itinéraire tracé. Il arrive à peu de distance du bois lorsque s'arrête, sur la RN 4, une voiture allemande dont les occupants ont aperçu les maquisards du 1er groupe qui vont entrer dans le bois. Un soldat allemand sort promptement du véhicule et tire sur les hommes de Léon, sans les atteindre. En l'espace d'un instant, le 2e groupe prend position sur le haut du talus qui surplombe la RN 4. Les balles du FM atteignent le soldat et la voiture qui s'enflamme. Les cinq occupants, dont une femme, sont tués. Le 2e groupe passe la nationale, parcourt le terrain situé entre la route et le bois. Ce groupe comprend notamment Jean Noël, Jean Dorckel, Raymond Fèvre, Pierre Labaye, Marcel Pourchasse, Henri Barrois... Au moment où le second groupe atteint la lisière du bois, une pluie de projectiles s'abat sur le dernier groupe qui vient de franchir la RN 4. Le tir provient d'un chemin forestier qui débouche du bois où stationnent, sous les feuillages par crainte de l'aviation alliée, plusieurs camions ennemis. C'est le guet-apens. Au lieu-dit le Coulon, six maquisards sont mortellement atteints : deux Russes, Edouard Roboskomo (né le 19 février 1922), Yvan Kostenko, deux Polonais, Edouard Gycanek, Casimir Gruchalski, deux jeunes Bragards, Georges Masselot, Maurice Loppin. Félicien Ménaille, d'Aulnois, est blessé à une jambe. Il parvient, en rampant, à atteindre la ferme de Sainte-Louvent, distante d'environ 800 m. Les quelques rescapés progressent, en rampant eux aussi, et sont sauvés par leur entrée dans le bois. Le FM de ce groupe est abandonné sur le terrain...

C'est vers 18 h que Pierre Leclerc, agriculteur, Marc Charoy et un autre habitant d'Aulnois prennent le risque de se rendre au Coulon avec un tombereau... muni d'un drapeau à croix rouge. Après un incident avec des troupes de passage, ils constatent le drame. Ils ramènent les six corps des maquisards. L'inhumation a lieu le soir même au cimetière d'Aulnois.

Maurice Loppin était né à Revigny-sur-Ornain le 9 décembre 1926. Sa famille s'installe à Saint-Dizier peu après sa naissance . Au sortir de l'école primaire, Maurice travaille chez un marchand de primeurs puis entre comme pompier à la ville.

Son meilleur copain, Georges Masselot, habitait chez ses parents, rue A. Thomas, dans le quartier des Ajots. C'est là qu'il naît, le 2 avril 1925. Quelques semaines avant d'entrer dans la Résistance, il est affilié à la JOC bragarde (mouvement illégal) le 25 mai 1944, en même temps qu'André Chemin.

(Source : étude inédite de Jean-Marie Chirol sur le maquis Mauguet). 

1D'après un article de Guennadi Netchaev paru dans «Etudes soviétiques» (1968).

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