mercredi 25 septembre 2024

Né à Paris, mort à Buchenwald : révélations sur le "commandant Legrand", disparu à Dijon


Un communiqué signé "Legrand". (Source : ADCO/Photo de l'auteur). 


 Pour qui s'intéresse à la Résistance en Côte-d'Or, l'oeuvre en sept tomes du regretté Gilles Hennequin est incontournable. L'auteur a eu l'occasion d'évoquer à plusieurs reprises le parcours du commissaire aux opérations régional (COR) des FTPF de la Côte-d'Or, Legrand, dont il n'a jamais su précisément ni le véritable nom, ni les date et lieu de naissance.

Au gré des différents tomes écrits par Gilles Hennequin, l'homme s'appellerait Lenormand (Max ou Etienne), ou Albert Moorel. En réalité, il se nommait Albert Moreels.

Il est né le 17 janvier 1922 à Paris (14e), boulevard Port-Royal, sous le nom de sa mère, Raymonde Delaistre, domestique à Vitry-sur-Seine âgée de 17 ans. Albert Delaistre grandit à Brénouille (Oise), où il est reconnu en mairie par Kléber Moreels, puis à Saint-Martin-Longueau. Au moment de l'Occupation, le jeune homme serait étudiant à l'école normale de l'Oise.

Réfractaire au STO, il est en Côte-d'Or en 1943. Sous le nom de Legrand, il commande la compagnie Lucien-Dupont, unité FTP de la région de Gevrey-Chambertin qui se livre à de nombreux sabotages. Début 1944 vraisemblablement, Albert Moreels hérite de la fonction de COR de la Côte-d'Or, c'est-à-dire en charge des opérations militaires des FTP. Selon Gilles Hennequin, il assume parallèlement la fonction de commissaire aux effectifs régional (CER).

Toujours d'après G. Hennequin, Legrand est arrêté le 18 avril 1944 à Dijon. Ensuite, sa trace se perd. Mort des suites de torture dans la cité ? Décédé lors de son transfert vers le camp de Compiègne ou en déportation ?

En réalité, Moreels a bien été déporté à Buchenwald. Dans son édition du 7 décembre 1945, le journal La Défense a en effet lancé un avis de recherche pour savoir ce qu'était devenu le déporté Albert Moreels, dit Maurice Lenormand, vu pour la dernière fois à Buchenwald (bloc 34) en octobre 1944. En mention marginale de son acte de naissance (sans mention "mort pour la France"), Moreels est déclaré décédé le 15 octobre 1944, en un "lieu non précisé".

Parmi les déportés du 17 août 1944 en direction de Buchenwald, il n'y a pas d'interné au nom d'Albert Moreels, mais un nommé Maurice Lenormand (sa fausse identité), né selon les sources en 1916 ou 1918. Ce déporté (matricule 78 469, bloc 38) est décédé de la turberculose le 27 janvier 1945 à Buchenwald. Or aucun Maurice Lenormand n'a vu le jour à Calais aux dates indiquées sur les documents consultables dans les archives Arolsen. En revanche, il est mentionné, sur une des fiches, que Lenormand résidait à Couchy (sic) en Côte-d'Or. Il s'agit plutôt de Couchey, où Albert Moreels, précisément, était hébergé sous l'Occupation. 

Il ressort de toutes ces informations qu'Albert Moreels est plutôt mort le 27 janvier 1945 à Buchenwald que mi-octobre 1944.

Homologué au grade de lieutenant, Albert Moreels, considéré comme FTP (groupe Alexandre Truchot) du 31 août 1943 au 18 avril 1944, a été fait chevalier de la Légion d'honneur à titre posthume en 1950 et il a reçu la médaille de la Résistance.

Sources : G. Hennequin, Résistance en Côte-d'Or, sept tomes, 1985-2010 ; archives du groupe Alexandre Truchot, GR 19 P 21/48, SHD ; état civil de Paris ; archives Arolsen.  

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